Hommes Princesses : Qui sont-ils et pourquoi ce phénomène

À moins d’avoir déserté les réseaux sociaux, vous avez déjà entendu l’expression « homme princesse ». Elle fait référence aux hommes qui s’attendent à recevoir des traitements jugés traditionnellement réservés aux femmes comme écrire un premier message, recevoir des marques d’attentions particulières (des fleurs, une invitation au restaurant). Cette expression a été popularisée par des vidéos virales humoristiques qui s’inspirent cependant d’une réalité -et j’avoue je me suis prêté au jeu.

Dans cet article, nous allons essayer d’aller un peu plus loin que l’humour et comprendre ce qui se trame derrière ce phénomène de l’homme princesse. Décryptons ensemble pourquoi certains hommes agissent de la sorte aujourd’hui. Je t’invite à continuer ta lecture mais tu peux aussi regarder ma vidéo sur le sujet :

D’hier à aujourd’hui : l’homme qui n’avait pas besoin d’être désirable

Pendant des siècles et jusque dans les années 50, l’attractivité d’un homme dans le cadre d’une relation ne se mesurait pas tant par son charme ou sa beauté mais en grande partie à sa fonction : protéger, nourrir, assurer la survie matérielle du foyer. La beauté, la séduction, l’art de se rendre attirant étaient davantage l’apanage féminin. Dans le cadre d’une relation, l’homme ne se différenciait pas en étant un objet de désir mais en remplissant un rôle. Petite rétrospective :

XIXe siècle – début XXe : l’homme reste essentiellement jugé sur son rôle économique. Le mariage est d’abord une affaire de sécurité et par tellement d’amour. La séduction masculine existe évidemment (dandy, poète, aristocrate), mais c’est marginal.

Après 1945 : l’essor de la classe moyenne et de la consommation introduit la figure de l’homme qui doit aussi “plaire”. On voit apparaître la publicité qui sexualise le corps masculin (parfum, voiture, cigarette). Mais cela reste encore faible comparé à la pression exercée sur les femmes.

Années 1960-70 : libération sexuelle, contraception et féminisme bouleversent les codes. Les femmes gagnent en autonomie et en pouvoir de choix. Le corps et l’attitude de l’homme deviennent un critère plus central.

Années 1990-2000 : explosion de la “métrosexualité”. L’homme prend soin de lui, va en salle de sport, met du gel, choisit ses vêtements. Le look et l’image deviennent une partie intégrante de l’identité masculine.

Depuis 2010 : avec les réseaux sociaux et les applications de rencontre, l’homme est aussi exposé et observé que la femme. Sa séduction passe par l’apparence là où traditionnellement elle passait surtout par l’action, l’audace et la bravoure. Il doit à présent séduire en vitrine, récolter des likes, investir dans son image s’il veut être sélectionné. C’est ici que le basculement devient massif : l’homme est à présent devenu pleinement un objet de désir.

Dans la culture occidentale contemporaine, l’homme ne peut plus s’imposer uniquement par son statut, ses ressources ou sa disponibilité. Les femmes étant indépendantes financièrement, elles choisissent librement leurs partenaires, parfois d’un simple swipe.

Résultat : une nouvelle compétition s’installe entre hommes, exacerbée par des applications fonctionnant à deux vitesses. Une majorité d’entre eux (près de 80 % selon une étude) sont jugés peu attirants, tandis qu’une minorité concentre l’essentiel de l’attention. Et c’est précisément parmi cette crème de la crème que l’on voit apparaître les comportements d’homme princesse.

Qui est l’homme princesse : portrait robot

L’homme princesse est le résultat d’une nouvelle dynamique relationnelle. Issu de cette minorité d’hommes jugés très désirables (les princesses sont rarement moches), il évolue dans un contexte où l’attention et les sollicitations viennent à lui sans effort particulier. Conscient de son attractivité, il se comporte non plus comme un conquérant, mais comme une personne à conquérir.

Il n’a pas besoin de multiplier les démarches : on like « l’homme princesse », on lui écrit le premier message, on le relance quand il ne répond pas, on s’applique à retenir son intérêt. Cette position de courtisé lui permet d’adopter des attitudes sélectives, voire capricieuses. Plutôt que d’investir activement et prendre des risques pour séduire, il observe ce que l’autre est prête à donner pour l’obtenir. Dans les interactions, son silence, sa rareté ou son retrait suffisent souvent à créer du manque.

Ce portrait n’est pas une caricature mais bien une nouvelle figure masculine qui, à l’image de la “femme trophée” d’hier, se définit moins par ce qu’il fait que par ce qu’il incarne. Telle la princesse qu’il faut courtiser pour en obtenir la main, l’homme princesse reflète l’inversion des rôles amoureux : il n’est plus seulement acteur de la séduction, il en est devenu l’objet. Vous l’aurez compris, pour comprendre l’homme princesse, il ne faut pas s’arrêter au comportement mais regarder les choses avec du recul, le comportement est le résultat d’un mouvement, d’un renversement des positions. Ce n’est jamais une simple question de mode.

Homme Princesse : De la caricature à la réalité

Ce qui était au départ une posture discrète, celle d’un homme totalement conscient de son attractivité et habitué à être sollicité, peut vite se transformer en caricature. C’est là que l’étiquette “homme princesse” prend tout son sens.

Certains hommes, en réalisant qu’ils n’ont plus besoin de faire grand-chose pour susciter l’intérêt, poussent le trait jusqu’à se comporter comme de véritables divas. Ils attendent qu’on les invite, qu’on les couvre d’attention, qu’on entretienne la relation à leur place. Leur valeur perçue devient une monnaie d’échange, et leur stratégie consiste moins à séduire qu’à se laisser séduire en mettant la barre toujours plus haut.

On retrouve alors des comportements stéréotypés : le caprice, l’exigence d’être choisi en priorité, la tendance à se vexer si l’attention se détourne. Autant d’attitudes qui rappellent la figure de la “princesse” dans l’imaginaire collectif, sauf qu’elles s’incarnent désormais chez certains hommes.

L’homme princesse, au sens caricatural du terme, est donc celui qui se love complètement dans cette position de courtisé, au point de renverser les rôles traditionnels : il ne donne plus, il reçoit, et il attend que cela paraisse normal.

Conclusion

Une fois que l’on a dit tout cela, il se faut rappeler qu’on ne devient pas “homme princesse” par simple volonté. Cette position dépend avant tout du regard des autres et de la dynamique qui s’installe. C’est parce qu’il est mis sur un piédestal, parce qu’on lui accorde sans cesse de l’attention et des efforts, qu’un homme peut finir par se comporter comme tel.

Et c’est là que réside un point essentiel : personne n’est obligé de jouer le rôle de la courtisane. La figure de l’homme princesse n’existe que si on accepte d’entrer dans son jeu. Autrement dit, ce phénomène ne révèle pas seulement quelque chose des hommes, mais aussi de la manière dont nous choisissons, collectivement, de nourrir ou non certaines postures dans la séduction contemporaine.