Les limites du polyamour

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Couple

Les limites du polyamour

Depuis plusieurs années je m’intéresse au polyamour, d’abord par curiosité comme beaucoup de monde -toi même tu sais 😉 mais surtout parce que l’on m’a posé la question bien des fois en me demandant ce que j’en pensais. Dans cet article je vais vous donner quelques pistes de réflexion qui sont les miennes sur le polyamour et notamment sur les limites qu’il peut présenter. Bien sûr il s’agit de ma vision, si vous êtes heureux dans une relation polyamoureuse, ne vous sentez pas attaqué, vivez votre vie comme bon vous semble sans vous soucier des autres.

Une entrée récente dans notre culture

L’entrée du polyamour dans la culture mainstream est relativement jeune, il me semble avoir lu ce terme pour la première fois dans un magazine féminin en 2016 (plutôt Grazia que Marie-Claire).  En faisant une rapide recherche sur Google Trends, outil ô merveilleux qui contrairement aux sondage nous révèle les véritables intérêts et inquiétudes des gens, on voit qu’il y a une nette progression aux US à partir de 2009, puis que le terme progresse de plus en plus avec une très nette augmentation vers 2016-2017.

Si on regarde notre beau pays qu’est ce que l’on constate :

La lame de fond y est moins forte mais il y a également une évolution qui a plutôt lieu par « pics » qui sont le plus souvent liés à une actualité, un article de presse ou une émission télévisé. Quoi qu’il en soit le constat est le suivant : l’idée de polyamour commence depuis deux-trois ans à s’imposer dans nos têtes comme une réalité et possibilité. Le plus souvent le sujet est traité via la parole de celles et ceux qui le pratiquent via des témoignages de très bonnes ou de très mauvaises expérience. En effet, on entendra beaucoup plus rarement parler d’expériences moyennes étant donné que c’est un angle peu séduisant pour présenter un article.

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Les limites physiques

Il y a une difficulté physique bien concrète dans les relations polyamoureuses, c’est que notre temps n’est pas infini. Nous avons dans nos journées, dans nos semaines, un certain nombre d’heures limitées que l’on peut consacrer à nos relations: couple, flirts, amis, famille, le reste étant consacré à notre repos, notre travail et aussi un peu à nous-même (enfin je vous le souhaite).

Le premier critère pour travailler sur une relation c’est le temps que l’on va y passer, c’est aussi vital dans la relation à ses enfants que dans sa relation amoureuse. Il y a un minimum de temps en dessous duquel la relation va régresser. Par exemple, si vous fréquentez une personne qui vous intéresse avec la contrainte de ne lui accorder que 2h de votre temps par semaine, il y a fort a parier que cette relation ne progressera jamais.

Donc en ouvrant une relation et fréquentant de nouvelles personnes, soit le temps accordé à ces personnes sera toujours limité par la première relation et de fait empêchera la progression vers une intensité plus grande, ce qui risque de provoquer la même frustration que peut vivre une maîtresse qui voudrait passer plus de temps avec celui qu’elle aime ;  soit ce temps sera retranché à la relation principale, ce qui peut de la même manière créer une frustration chez celui ou celle qui a le sentiment de rétrograder de relation principale à relation secondaire. Bref, à un moment où à un autre, une ou plusieurs personnes risquent d’être frustré de voir leur relation stagner ou reculer, et sentir que l’on a atteint une limite avec une personne peut également amener à nous en désintéresser.

Projection à long terme

Le second obstacle qui vient dans la suite logique du premier est qu’il est compliqué de voir à long terme avec tous ses partenaires. Imaginons que vous fréquentez trois hommes, vous ne pourrez pas habiter chez le premier, avoir des enfants avec le second ou ouvrir un restaurant en Californie (votre rêve) avec le troisième. L’être humain a besoin de projets, il a besoin d’objectifs stimulants, de choses nouvelles à entreprendre, sur lesquelles travailler. On pourrait rétorquer que « oui, on peut avoir une relation principale avec tous ces projets (maison, enfants, restaurant) puis des relations secondaires », mais il faut alors s’imaginer dans la relation secondaire car le polyamour n’est pas ce que l’on pourrait appeler un système égalitaire. Si cela devenait la norme, alors certaines femmes moins chanceuses que d’autres cultiveront uniquement des relations secondaires plus légères avec un accès limité à leur partenaire. Elles auront de la diversité mais pas la qualité d’une relation qui se donne du temps.

Gestion des émotions (jalousie, manque, angoisse)

Je vais passer très rapidement sur ce point même si c’est celui qui revient le plus souvent comme obstacle dans les témoignages de personnes s’étant essayées au polyamour: la difficulté de gérer ses émotions et celles des autres. Je ne pense pas que cela soit une vraie limite, c’est davantage un facteur qui va faire que l’on parvient ou que l’on n’y parvient pas (ou alors en le vivant assez mal) de même que quelqu’un qui a peur du vide va devoir travailler beaucoup plus pour sauter en parachute qu’une personne qui recherche les sensations fortes.

Cela occasionne aussi un temps supplémentaire, temps durant lequel on va discuter des règles que l’on se fixe, communiquer pour se rassurer, pour accompagner, un peu comme les entreprises quand elles sont en gestion de crise et qu’elles doivent suspendre leurs efforts pour s’assurer que le virage difficile est correctement négocié.

Deux poids deux mesures

L’inégalité ou le déséquilibre dans une relation constitue un danger, même dans les aspects les plus triviaux du quotidien, et forment une pente glissant vers le ressentiment. Par exemple: si j’estime que mon partenaire fait moins attention à moi que je ne fais attention à lui ou encore si je passe beaucoup de temps à m’occuper de la famille et qu’il n’y contribue pas assez.

Avec le polyamour, d’autres déséquilibres peuvent se présenter dans la relation, le fait par exemple qu’une femme parvienne a trouver facilement de nouveaux partenaires et que l’homme n’y parvienne pas ou alors au prix de très grands efforts. Ne riez pas, j’ai précisément rencontré ce cas en coaching. On peut toujours discuter de ces déséquilibres pour chercher à les faire accepter, mais parler ne résout pas toujours un problème, d’ailleurs parlez à une balance qui est déséquilibrée, elle le restera, il faut simplement poser un contrepoids sur le plateau pour la rétablir à l’équilibre.

Un jeu de rencontre à deux vitesses

Qui va ressentir des bénéfices dans sa vie du fait de devenir polyamoureux, à savoir accéder à de nouvelles personnes et relations intéressantes? Sont-ce les hommes ? Les femmes ? Pour moi la lecture n’est pas genrée, le polyamour bénéficiera avant tout aux gens qui ont le plus d’opportunités de rencontres. Les personnes qui sont les plus attractive, qui savent facilement créer des occasions, plaisent, savent draguer, séduire et qui savent se mettre en valeur sur les applications de rencontres vont pouvoir nouer des nouvelles relations parmi le flot d’opportunités qui se présentent à elles.

Au final c’est un peu le même piège qui guette pas mal d’utilisatrices d’applications de rencontre. Celles-ci donnent l’illusion d’un choix plus grand, de possibilités plus nombreuses, cela n’est vrai que dans la théorie car certes on devient plus visible en rayonnant dans un espace plus grand, mais dans la pratique d’une part il est plus dur de choisir car il faut alors renoncer à des potentiels hommes « mieux » mais il est aussi plus difficile de saisir un homme par les sentiments car celui-ci a lui-même l’illusion d’un choix plus vaste et rechigne à se poser croyant pouvoir trouver toujours mieux, et surtout la mise en concurrence est plus rude.

Il ne faut pas tomber dans  l’illusion que polyamour permettrait de se créer davantage d’opportunités, il permettra juste (si il se démocratise) d’exploiter les opportunités existantes relatives à notre pouvoir de séduction.

Se contraindre est difficile

Une des remarques qui revient chez l’homme comme chez la femme dans les différents témoignages polyamoureux que j’ai pu lire c’est que la monogamie est contraignante. Ne pas pouvoir goûter à tous les possibles est en effet une contrainte et que cette contrainte est parfois la cause de séparation. Mais le polyamour, s’il lève l’interdit de l’exclusivité sexuelle, remplace celle-ci par les autres contraintes évoquées plus haut, ainsi que par des contraintes visant à cadrer la relation, comme le montre cet extrait d’un témoignage:

[blockquote text= »Ensuite, nous avons des règles « de vacances » : on ne peut pas rester avec quelqu’un pendant plus de 48 heures et on doit s’appeler avant d’aller dormir. Les règles changent tout le temps ; il faut toujours discuter de ce qui nous met à l’aise ou pas » text_color= » » width= » » line_height= »undefined » background_color= » » border_color= » » show_quote_icon= »no » quote_icon_color= » »]

Beaucoup affirment que le polyamour est une version plus honnête de vivre nos relations, correspondant davantage à nos comportements, nos envies, nos sentiments, car beaucoup de personnes dans des relations exclusives se mentent et entretiennent des relations adultères. Ils enfreignent en effet une règle du couple, mais un couple polyamoureux n’échappe pas à ce problème, même si la règle enfreinte n’est pas celle de coucher avec une personne ou de développer des sentiments forts, n’importe quelle autre règle décidée par le couple peut être également bafouée et avoir des conséquences douloureuses pour le couple.

Au final, exclusif ou non, l’être humain est susceptible de perdre de l’intérêt pour son ou sa partenaire, de faire d’autres rencontres qu’elles soient prévues ou non, d’éprouver des sentiments plus ou moins intenses, allant du simple désir à la passion amoureuse pour l’une ou l’autre de ces rencontres. Le polyamour ne sécurise pas une ou plusieurs relations, pas plus que le couple monogame, mais il permet de se sentir bien avec le fait d’avoir différents partenaires et de ne pas culpabiliser, de ne pas avoir à se cacher, de ne pas avoir à mentir. Beaucoup décrivent leur démarche polyamoureuse comme leur permettant de se sentir plus aligné avec ce qu’ils ressentent.

Par ailleurs la contrainte comme je l’ai évoquée n’est pas une mauvaise chose pour le couple, elle permet tout d’abord de se montrer créatif et de trouver d’autres façons de développer sa relation, et elle nécessite également de travailler notre discipline, qui est à mon sens une qualité essentielle pour une relation épanouie, qu’elle soit polyamoureuse ou monogame. Mais cela fera l’objet d’un autre article.

Commentaires (13)

  1. Quentin

    Merci yann pour cette article ! Pour en revenir au sujet je pense que le polyamour n’est pas une bonne chose pour une vraie relation amoureuse, car finalement le fait d’avoir profité jeune de ça vie amoureuse et sexuelle permet d’avoir un sentiment d’accomplissement dans ça vie et on ne ressens plus le besoin d’aller voir ailleurs si on à trouver notre moitié. Les perssones n’ayant pas connu assez d’expérience et d’opportunités vont eux par contre avoir tendance à céder plus facilement ,d’ou le polyamour, un couple pour moi ça reste deux perssones qui s’aiment et si il y à un manque de désire chez l’autre alors il faut commencer à prendre des décisions qui seront peut-être douloureuse mais nécessaire.

    1. Yann Piette

      Je pense que l’envie de diversité (le besoin pas forcément) sera présent même pour une personne qui a eu différents partenaires auparavant. C’est parfaitement humain.

    2. Si on considére que le polyamour remplace une norme ‘la monogamie) par une autre (le polyamour) je crois qu’on se fourre le doigt dans l’oiel. C’est comme si on considérait que l’homosexualité était à la mode…il y a des millions de manières de relationner entre êtres humain. C’est comme si on revandiquer le célibat plutôt que de se mettre en relation amoureuse avec quelqu’un…Plus de temps, jalousie , contraintes … Pour ma part je pense seulement que l’adultère est vécu depuis des siécles et que partir du principe que tout au long d’une vie nous ne désirerons qu’une seule et même personne est un joli canular. La monogamie est une construction sociale. Qui va à celui ou celle qui a conscience qu’il existe parmi plusieurs autres possibilités d’être amoureu.ses. . Et les personnes bi ? Comment sont elles considérées ?

  2. Phocea

    Au fond on n’a toujours pas trouvé le modèle universel des relations amoureuses qui mette tout le monde d accord (monogamie = possession et adultère ; polyamour = quantité à défaut de qualité et de stabilité pour fonder une famille .. etc.)
    Peut être que ca correspond à ceux qui se cherchent encore. Plus éthique que le libertinage ou la polygamie ?

    1. Yann Piette

      L’être humain est insatisfait par nature, tout simplement.

  3. Rachline

    Merci Yann pour cet article. Tu as souligné des points pertinents qui montrent les limites du polyamour.

    1. Yann Piette

      Merci 🙂

  4. nekkksss

    Bonjour Yann, que penses-tu des plans à 3 ponctuels pour apporter du piment dans sa vie de couple ? Choisir une personne de confiance à deux

    1. Yann Piette

      Pourquoi pas, si les deux partenaires le veulent (et pas juste un qui l’impose à l’autre). Au final je pense que ça répond plus à l’envie de nouveauté / de diversité de l’un ou de l’autre qu’à l’envie de piment. Rendre ta vie sexuelle intense est complètement possible à deux.

  5. Ardo

    « Le polyamour ne sécurise pas une ou plusieurs relations, pas plus que le couple monogame, mais il permet de se sentir bien avec le fait d’avoir différents partenaires et de ne pas culpabiliser, de ne pas avoir à se cacher, de ne pas avoir à mentir ». Je crois que ceci résume ce que je pense de ce concept que je découvre d’ailleurs ici. On parle de règles de base mais je reste persuadee que ce sont ceux qui les fixent qui les enfreignent les premiers. Meme la polygamie n’est pas obligatoire en religion musulmane, c’est simplement autorisé et cest à l’appréciation du couple (mm si certains hom interpretent à leur guise lol)… Mais dis moi un peu en polyamour qu’en sera t il si chacun des multiples partenaires se retrouve à en avoir à chaque occasion un de plus (partenaire)… Au final que peut on vraiment tirer de positif constructif et durable de cette forme de relation??
    Merci pour ton article Yann. Bonsoir!

  6. Rose

    Bonjour Yann, j ai découvert votre chair récemment et vos propos résonnent souvent en moi. Je suis malheureusement dans une relation polyamoureuse, je l accepte car je suis amoureuse mais il ne m accorde que très peu de temps. Je me dit que si je le quittais, je serais encore plus malheureuse. Merci pour tous vos conseils.

  7. Rose

    * désolée pour l’ erreur : « j ai découvert votre chaîne récemment « .

  8. lily

    merci grâce à toi mon travaille de philo va être su a coche

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